Femme chien

Malgré sa facture naturaliste, le dessin de Fred Laforge suscite l’étrangeté. Par la finesse du dessin, l’artiste conforte notre conception de l’art comme savoir-faire et notre capacité à reconnaître le sujet. Or, le chien et la femme nous sont rendus moins familiers par le renversement d’échelle, qui place l’animal en position de domination sur l’humain. Les figures apparaissent sur un fond neutre indéfini qui rend leur relation encore plus sibylline, bien que leur face à face semble tenir d’une découverte mutuelle où chacun se jauge avec réserve.

L’artiste s’intéresse depuis des années à la figure humaine pour ce qu’elle a de singulier et d’inhabituel. S’écartant des stéréotypes véhiculés dans les médias populaires et du beau idéal privilégié dans la statuaire classique, il met en scène ces corps atypiques que notre société privent souvent d’images positives, tels ceux des personnes obèses et atteintes de trisomie. Dans Femme chien, Laforge explore par le truchement de la pilosité le rapprochement qui existe entre l’animal et l’humain. Ce point commun, il l’a exacerbé dans des sculptures à échelle humaine où des femmes disparaissaient et ployaient sous une chevelure abondante, comme si elles devenaient victimes de la parure qu’elles avaient voulu arborer. Le travail de l’artiste traite ainsi autant de la tyrannie de l’image parfaite que de l’importance d’apprivoiser l’autre et ses différences.